Négocier d'une main, punir de l'autre ? L'énigme de Kinshasa face à l’AFC/M23 décryptée par le Sénateur Ngoyi Kasanji

Alors que les pourparlers de Doha offrent une fragile lueur d'espoir pour l'Est congolais, le Sénateur Alphonse Ngoyi Kasanji met le doigt sur une contradiction troublante au cœur de la stratégie gouvernementale : comment concilier la table des négociations avec le M23 et la stigmatisation, voire la répression, de ceux qui lui sont prétendument liés ? Une question brûlante qui révèle les dilemmes complexes et les risques d'une paix à double tranchant.
L'atmosphère à Kinshasa est électrique, oscillant entre un optimisme prudent et une méfiance tenace depuis l'annonce de la signature d'un communiqué conjoint entre le gouvernement de la République Démocratique du Congo et l'AFC/M23 à Doha. Si cette avancée diplomatique inédite est perçue par certains comme une timide victoire de la raison, elle n'en soulève pas moins des interrogations fondamentales sur la cohérence de la politique de paix prônée par les autorités congolaises. Au centre de ce questionnement acéré, la voix du Sénateur Alphonse Ngoyi Kasanji se dresse, pointant une logique potentiellement autodestructrice.
Sur la toile, via une publication incisive sur X, le Sénateur, figure respectée pour son plaidoyer en faveur de l'unité nationale et du développement inclusif, a mis en exergue une dissonance cognitive déconcertante : « Si on négocie avec le M23, pourquoi punir ceux ou celui que vous estimez être avec eux ? » Cette interrogation, formulée avec une clarté chirurgicale, expose la fragilité d'une démarche qui semble naviguer entre deux eaux : la reconnaissance implicite du M23 comme interlocuteur légitime à la table des négociations et la criminalisation de ceux qui, pour diverses raisons, sont suspectés de lui apporter un soutien.
Pour l’ancien gouverneur du Kasaï Oriental, Ngoyi Kasanji, cette schizophrénie politique recèle un danger majeur. Elle risque non seulement d'alimenter un sentiment d'injustice et de marginalisation au sein des communautés de l'Est, terreau fertile pour de nouvelles frustrations et rancœurs, mais aussi de fragiliser la crédibilité même des négociations. Comment construire une paix durable si une partie de la population est d'emblée considérée comme coupable par association ? L'ombre de la suspicion et de la répression plane, menaçant d'étouffer dans l'œuf toute tentative de réconciliation véritable.
Au-delà de cette contradiction flagrante, le Sénateur appelle à une vision holistique de la pacification. « J’apprécierais que tout le monde concourt à la décrispation du climat tendu dans notre pays, en adoptant une posture réconciliante et d’apaisement », a-t-il insisté, soulignant que la paix ne saurait se limiter à un accord entre belligérants, mais doit irriguer l'ensemble du corps social. Il plaide pour une extension de cette logique de dialogue à toutes les strates de la société congolaise, y voyant le seul rempart véritable contre la résurgence des conflits.
Avec une sagesse puisée dans l'histoire récente de la RDC, Ngoyi Kasanji rappelle la portée symbolique de l'alternance pacifique, un moment d'unité nationale qu'il exhorte à ne pas galvauder. Son appel vibrant à « briser les dents d’inimitiés » et à « construire la cohésion nationale et l’unité » résonne comme un impératif catégorique face aux forces centrifuges internes et aux manœuvres externes visant à perpétuer l'instabilité.
La question tranchante du Sénateur Ngoyi Kasanji agit comme un révélateur des complexités inhérentes à la résolution d'un conflit aussi profond que celui qui déchire l'Est de la RDC. Elle met en lumière la nécessité impérieuse d'une stratégie cohérente et inclusive, où la main tendue de la négociation ne soit pas contredite par le poing de la répression. L'écho de cette interpellation sage et lucide pourrait bien être déterminant pour transformer la fragile lueur de Doha en une aurore de paix véritable et durable pour le peuple congolais.
Guyvenant Misenge