RDC: la mise sur l'agriculture pour une diversification économique et une meilleure intégration au commerce mondial

La République démocratique du Congo (RDC) opère un virage stratégique majeur dans sa politique commerciale, passant d'une dépendance historique aux minerais à une priorité affirmée pour le secteur agricole.
C'est le message fort délivré par le Ministre du Commerce Extérieur, Julien Paluku Kahongya, lors du Briefing presse de ce mardi 27 mai 2025, aux côtés du ministre Patrick Muyaya, Porte-parole du Gouvernement où il a souligné la nécessité pour le pays de tirer un meilleur profit de ses richesses naturelles et de s'assurer une croissance plus inclusive.
Longtemps dominé par l'exportation de matières premières telles que le cobalt, les diamants, le cuivre et le coltan, le commerce extérieur congolais n'a, selon le ministre, pas suffisamment bénéficié à la population. "Aujourd'hui, comme l'année passée, nous avons exporté 152 000 tonnes de cobalt et environ 3 100 000 tonnes de cuivre.
Mais cela nous a laissé un goût amer pour la ménagère," a-t-il déploré, soulignant l'écart entre la valeur brute de ces exportations et les retombées concrètes pour les ménages. À titre d'exemple, M. Julien Paluku a révélé que la production annuelle de cobalt, évaluée à 33 000 dollars la tonne, représente près de 59 à 60 milliards de dollars, tandis que celle du cuivre atteint 9 milliards de dollars pour 5 millions de tonnes. Pourtant, malgré ces chiffres impressionnants, la population n'en ressent pas les effets escomptés.
Face à ce constat, le gouvernement congolais entend "démanteler la primauté du cobalt" et réorienter ses efforts vers l'agriculture. "Le secteur minier n'a pas été trop clair sur ça, nous allons démanteler la primauté du cobalt dans les secteurs agricoles," a martelé le Ministre.
Cette nouvelle orientation se traduira par la mise en œuvre de "politiques prioritaires" au niveau du secteur du commerce, incluant le démantèlement de la stratégie nationale de production axée sur les minerais.
La justification de ce pivot vers l'agriculture est double. Premièrement, une comparaison éloquente des prix des matières premières révèle le potentiel inexploité du secteur agricole. Alors que la tonne de cuivre se négocie à 9 550 dollars et la tonne de cobalt à 33 000 dollars, la tonne de cacao, elle, atteint 10 310 dollars, surpassant ainsi le cuivre. Ce différentiel de prix met en lumière la valeur ajoutée potentielle des produits agricoles.
Deuxièmement, l'agriculture est perçue comme un puissant levier de développement inclusif et de création d'emplois.
Le Ministre a souligné l'importance d'améliorer les conditions d'alimentation et d'investir massivement dans l'agriculture pour assurer non seulement l'évolution du secteur, mais aussi la création d'emplois.
Il a révélé que le pays compte déjà 20 millions d'agriculteurs, avec un objectif ambitieux d'atteindre 100 millions, démontrant le potentiel immense de ce secteur en termes d'absorption de la main-d'œuvre.
Pour concrétiser cette ambition, l'identification de marchés porteurs est cruciale. Le Ministre Paluku a détaillé les principaux débouchés pour les produits congolais :
- Les États-Unis : Grâce à la voie de l'AGOA (African Growth and Opportunity Act), qui permet aux pays africains d'exporter leurs produits vers les États-Unis.
- Le Marché Européen : À travers les accords de partenariat et de produits que l'Europe a établis avec les pays d'Afrique.
- Le Marché Chinois : Avec ses 1,4 milliard de consommateurs, la Chine représente un marché colossal et en pleine expansion pour les produits congolais.
- Le Marché Intérieur : Le Ministre a souligné l'importance de ce marché, avec une population approchant les 100 millions d'habitants.
- Le Marché Africain : La Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf) offre un marché de 1,3 milliard de consommateurs africains, avec la suppression des barrières tarifaires et non tarifaires.
Le Ministre a tenu à préciser les règles d'origine des produits, un élément clé pour bénéficier des avantages des accords commerciaux. Un produit est considéré comme originaire d'un pays si au moins 70% de ses intrants sont entièrement produits dans ce pays. Cette règle vise à protéger l'économie nationale et à encourager la transformation locale des matières premières.
Ainsi, un véhicule assemblé en RDC mais dont moins de 70% des composants sont d'origine congolaise ne pourra pas être labellisé "produit d'origine congolaise". Cette mesure vise à éviter la simple réexportation de produits étrangers et à garantir de réelles retombées économiques pour la RDC.
En conclusion, la RDC se positionne résolument vers une diversification de son économie, avec l'agriculture en fer de lance.
Cette stratégie, portée par le Ministre Julien Paluku Kahongya, vise à transformer les richesses du pays en un développement durable et inclusif pour l'ensemble de sa population, en exploitant pleinement les opportunités offertes par les marchés régionaux et internationaux.
Gracieux Bazege