RDC : Malgré l'ambition, la sous-capitalisation du FOGEC freine la lutte contre le chômage des jeunes
La résorption du fléau du chômage chez les jeunes demeure une préoccupation centrale et impérieuse pour l'exécutif congolais. À cet effet, le Ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya, a co-animé ce mercredi 26 novembre 2025, un briefing presse de haute importance avec son homologue de l’Entrepreneuriat et Développement des PME, Justin Kalumba Mwana-ngongo. Ce point de presse avait pour objet la restitution des conclusions de la Table ronde nationale sur l'emploi et l'entrepreneuriat des jeunes, soulignant l'engagement gouvernemental à structurer une réponse pérenne à ce défi sociétal majeur.
Au cours de ce rendez-vous crucial, le Ministre Kalumba Mwana-ngongo a dévoilé les trois axes prioritaires qui étayeront la stratégie gouvernementale contre le chômage : la formation professionnelle, l'emploi et l'entrepreneuriat. S'agissant plus particulièrement de la formation, le ministre a martelé la nécessité d'établir une école de formation professionnelle spécialisée par filière dans chaque province. Selon lui, cette décentralisation des centres de métiers concoure à préparer adéquatement les jeunes pour une insertion dans des secteurs spécifiques et endogènes à leurs provinces, visant ainsi à « réconcilier la qualification professionnelle » avec les besoins réels du marché du travail local.
De toute évidence, cette orientation est fondamentale au regard des chiffres : des rapports internationaux soulignent un taux de chômage des jeunes urbains qui oscille entre 40 % et 60 %, révélant un goulot d’étranglement bien identifié entre les qualifications académiques et les compétences réellement recherchées. Organisée sous la haute vigilance du Président Félix Tshisekedi, la Table ronde a érigé la création d'opportunités d’emploi durables en priorité absolue pour ce second quinquennat. Concrètement, l'accent mis sur l'ANADEC (capacitation), le FOGEC (crédit) et l'ANAPEX (marchés) symbolise la volonté de construire un écosystème institutionnel complet pour l'entrepreneur.
Le facteur FOGEC, un goulot d'étranglement financier
En dépit de l'éloquence des discours et de la pertinence du triptyque Capacitation-Crédit-Contrats, des sources internes confirment que le Fonds de Garantie de l'Entrepreneuriat au Congo (FOGEC) constitue un handicap dirimant. En effet, le FOGEC est largement sous-capitalisé, n'atteignant même pas le milliard de francs congolais de capitalisation effective. Cette dissymétrie majeure entre l'ambition politique et les moyens financiers réels pour soutenir l'axe du Crédit est une faille critique. Le FOGEC, qui devrait couvrir les risques bancaires, ne peut offrir qu'une couverture de risque négligeable, perpétuant l'exclusion du système bancaire classique pour la majorité des jeunes entrepreneurs.
L'urgence d'une recapitalisation pour la crédibilité
Un rapport de la Banque Mondiale (2020) soulignait déjà que la croissance économique de la RDC est peu inclusive. Par conséquent, le fait que le FOGEC soit sous-doté signifie que son rôle de catalyseur d’investissement est, pour l'heure, théorique. Il est impératif que le gouvernement procède rapidement à une recapitalisation significative du FOGEC, via des dotations budgétaires conséquentes ou par la mobilisation de partenaires techniques et financiers. Faute de quoi, les jeunes formés par l'ANADEC et préparés à accéder aux marchés via l'ANAPEX se heurteront inéluctablement au mur du financement, limitant ainsi l'impact macroéconomique du programme sur la réduction du chômage.
Nécessité d'intégrer le secteur informel et le numérique
Enfin, pour que la stratégie gouvernementale ait un impact à l'échelle nationale, elle doit impérativement interagir avec la réalité économique dominante en RDC, où le secteur informel représente plus de 80% des emplois. Le programme doit dépasser la seule création de structures formelles pour inclure des mécanismes de formalisation simplifiée et de soutien aux micro-entrepreneurs informels qui sont le quotidien de millions de jeunes. De plus, les experts en développement recommandent une intégration massive de la formation aux métiers du numérique à travers l'ANADEC et des plateformes de mise en relation, ce qui représente un levier de croissance exponentielle souvent sous-exploité en Afrique centrale.
Notons que, la stratégie gouvernementale marque une prise de conscience de l'urgence. Toutefois, l'efficience de la gouvernance et la transparence dans la recapitalisation et l'allocation des fonds du FOGEC seront des indicateurs déterminants de sa capacité à bâtir un tissu entrepreneurial résilient capable d'absorber la pression démographique juvénile et de contribuer structurellement à la prospérité du Congo.
Christian Mutombo
