Doha, l'épreuve de vérité : Tshisekedi face aux diktats de l'AFC/M23, la RDC au bord du précipice ?

9 Avril 2025 - 15:42
 0
Doha, l'épreuve de vérité : Tshisekedi face aux diktats de l'AFC/M23, la RDC au bord du précipice ?

Les projecteurs crépitent à Doha, mais l'atmosphère y est électrique, chargée des ultimatums d'une rébellion qui défie l'autorité de Kinshasa. L'Alliance des Forces Démocratiques du Congo (AFC)/Mouvement du 23 Mars (M23), maîtres de facto de Goma, Bukavu et d'un immense territoire à l'Est, ne vient pas à la table des négociations en mendiant. Non, elle arrive avec un chapelet de conditions préalables audacieuses, des "mesures de confiance" qui sonnent comme des diktats. Le Qatar, facilitateur de cette rencontre explosive, a du pain sur la planche pour espérer déminer le terrain avant que le dialogue ne tourne court.

L'AFC/M23 affiche une ambition claire : forger un environnement "propice" à des discussions avec Kinshasa, sous l'égide qatarie, pour enfin éteindre l'incendie sécuritaire qui dévore l'Est depuis trop longtemps. Mais le prix à payer, si l'on en croit les exigences rebelles, risque d'être exorbitant pour le gouvernement congolais.

Au cœur de cet affrontement verbal, une demande qui a des allures de bras de fer : une déclaration solennelle de Félix Tshisekedi lui-même. Les rebelles exigent un engagement public, sans la moindre ambiguïté, en faveur d'un dialogue direct avec leur mouvement. Pour l'AFC/M23, c'est une question de légitimité politique, une reconnaissance qu'ils n'ont jamais obtenue. Mais à Kinshasa, cette requête pourrait être perçue comme une capitulation humiliante, un reniement de la ligne dure adoptée jusqu'à présent. Négocier directement avec ceux que l'on qualifie d'agresseurs ? Le dilemme est cornélien.

Autre pierre d'achoppement majeure : l'abrogation pure et simple de la résolution incendiaire de l'Assemblée nationale du 8 novembre 2022. Ce texte, voté dans un contexte de crise aiguë, fermait catégoriquement la porte au brassage ou à l'intégration des groupes armés au sein des forces de sécurité congolaises. Pour l'AFC/M23, cette résolution est un mur infranchissable, un obstacle à toute perspective de réinsertion. L'annuler serait un camouflet pour les représentants du peuple congolais.

Sur le terrain judiciaire, les exigences rebelles sont tout aussi explosives. Ils réclament ni plus ni moins que l'annulation des condamnations à mort, des poursuites et des mandats d'arrêt qui visent leurs leaders et leurs cadres. La libération des détenus civils et militaires soupçonnés de liens avec leur mouvement est également mise sur la table. Toucher à la souveraineté de la justice congolaise, voilà un pari risqué qui pourrait embraser l'opinion publique et les institutions du pays.

Mais l'AFC/M23 ne s'arrête pas aux mesures politico-militaires. Ils mettent le doigt sur la plaie béante des divisions communautaires, exigeant de Kinshasa qu'il mette un terme définitif aux discours de haine, aux actes de discrimination et au déni de nationalité dont se disent victimes certaines populations de l'Est. Cette exigence révèle la dimension profondément politique et identitaire de la crise, rappelant que les armes ne sont que le symptôme d'un mal plus profond.

Face à ces conditions draconiennes, Kinshasa campe sur ses positions. La délégation congolaise à Doha martèle : cessez-le-feu immédiat et retrait sans condition de Goma, Bukavu et de toutes les localités occupées. Une ligne rouge, un ultimatum qui place d'emblée les deux parties au bord du précipice.

La question brûle les lèvres : Félix Tshisekedi osera-t-il la moindre concession face aux exigences de l'AFC/M23 ? L'opinion publique, meurtrie par des années de conflit, tolérera-t-elle un pas en arrière perçu comme une soumission ? De son côté, la rébellion semble inflexible, déterminée à obtenir des garanties politiques et sécuritaires tangibles avant d'envisager le moindre recul territorial.

Le Qatar, funambule de la diplomatie, se retrouve face à une tâche herculéenne. Comment concilier des positions aussi diamétralement opposées ? La communauté internationale retient son souffle, consciente des enjeux humanitaires et régionaux colossaux.

Alors que les pourparlers à Doha débutent à peine, le spectre de l'impasse plane déjà. Les conditions posées par l'AFC/M23 soulèvent une question lancinante : la volonté de paix est-elle sincère des deux côtés ? Kinshasa pliera-t-il, au risque de déstabiliser son propre pouvoir ? L'avenir de l'Est congolais, le destin de millions d'âmes, sont suspendus à cette fragile équation.


Gracieux Bazege

newnarratifrdc Créé en 2023, New Narratif RDC est un média en ligne de l'Ets. Groupe New NARRATIF RDC. Dans son traitement d’informations, New NARRATIF RDC accorde l’importance à l’image positive de la République démocratique du Congo et de ses institutions en vue de pérenniser le «CHANGEMENT DE NARRATIF »