RDC : Le Gouvernement veut reprendre le contrôle du paysage audiovisuel et renforcer la collecte de la redevance

Le Ministre de la Communication et Médias a présenté deux rapports majeurs au Conseil des ministres, marquant une volonté ferme de restructuration et de régulation du secteur audiovisuel en République démocratique du Congo. D’une part, il s’agit d’un état d’avancement du processus de perception de la redevance audiovisuelle, et d’autre part, d’un diagnostic sans complaisance sur la situation de salubrité médiatique dans le pays.
S’agissant de la redevance audiovisuelle, le Ministre a rappelé que la collecte de cette contribution citoyenne, applicable aux abonnements des télédistributeurs et à la vente d’équipements audiovisuels, repose sur des dispositions légales existantes mais jusque-là peu appliquées.
Patrick Muyaya a salué les avancées significatives obtenues dans ce domaine, notamment avec des opérateurs majeurs tels que CANAL+, Startimes et Easy TV, qui ont accepté de signer des protocoles d’accord avec la Radio-Télévision Nationale Congolaise (RTNC). Ces protocoles prévoient un taux de collecte initial de 2,4 %, appelé à évoluer en fonction des performances et du niveau d’intégration dans les systèmes de facturation.
Un nouvel arrêté interministériel portant fixation des taux et modalités de perception de la redevance a été transmis au Ministre des Finances pour examen et signature. Le Gouvernement entend, à travers ce dispositif, assurer une centralisation des fonds collectés et garantir une redistribution conforme aux besoins du service public.
Ce processus s’appuiera sur la collaboration des institutions comme la Direction Générale des Douanes et Accises (DGDA), la Direction Générale des Impôts (DGI), l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPTC), mais aussi les entreprises publiques telles que la SNEL et la REGIDESO.
Conscient des défis logistiques que représente ce chantier, le Ministre a sollicité l’implication du Ministère de l’Intérieur et des autorités provinciales pour appuyer la signature des protocoles d’accord sur l’ensemble du territoire. Il a aussi plaidé pour une intervention urgente du Gouvernement en vue d’équiper les stations régionales et de lancer officiellement la chaîne RTNC Info, une nouvelle chaîne nationale entièrement dédiée aux informations.
Par ailleurs, le second rapport du Ministre a porté sur l’assainissement du paysage médiatique congolais. Le constat est alarmant : moins de 30 % des éditeurs de programmes à Kinshasa sont en règle du point de vue administratif, et à peine 33 % remplissent leurs obligations vis-à-vis de l’État en matière fiscale et réglementaire.
Ce déséquilibre compromet la qualité de l’information diffusée et affaiblit la souveraineté médiatique du pays, largement dominée par les télédistributeurs privés.
Ministre Muyaya a ainsi présenté les conclusions d’une première phase de contrôle menée dans la capitale, qui a conduit à la récupération de 48 fréquences radios et au retrait des canaux de 132 éditeurs de programmes ne remplissant pas les critères techniques, administratifs ou financiers requis.
Le ministre a proposé la révision de plusieurs arrêtés ministériels encadrant la régulation du secteur, en particulier ceux définissant les acteurs du paysage audiovisuel, les modalités de perception des droits et taxes, et les prérogatives de la Commission de contrôle de conformité.
Un accent particulier a été mis sur la nécessité de reconquérir la souveraineté audiovisuelle nationale, alors que les télédistributeurs privés contrôlent à eux seuls plus de 94 % du contenu télévisé diffusé en RDC. Le Ministre a aussi évoqué l’urgence de bannir l’importation de récepteurs analogiques, pour accompagner la transition vers le numérique et lutter contre le piratage.
Dans ce contexte, Patrick Muyaya a sollicité un appui financier pour renforcer la Commission de contrôle, lui permettre d’étendre ses missions aux 26 provinces du pays, et dresser une cartographie actualisée du secteur.
Le Conseil des ministres a pris acte de ces rapports et promis un accompagnement ferme pour permettre une meilleure organisation du secteur, une juste répartition des ressources et une souveraineté médiatique effective au bénéfice de tous les Congolais.
Gracieux Bazege