Guerre Hybride à l'Est : Muyaya doctrine l'élite militaire pour la contre-offensive médiatique

Confronté à une crise sécuritaire complexe dans l'Est de la RDC, où les dynamiques militaires et informationnelles s'imbriquent étroitement, le gouvernement renforce la préparation de ses futurs leaders militaires sur le front crucial de la communication. Le ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya Katembwe, a ainsi dispensé une formation stratégique pointue aux auditeurs du prestigieux Collège des Hautes Études de Stratégie et de Défense (CHESD), les armant des outils intellectuels nécessaires pour déjouer les manœuvres médiatiques adverses et maîtriser l'art délicat de la communication de crise.
C'est dans ce contexte stratégique que l'amphithéâtre Tshanzu, véritable épicentre de la pensée militaire congolaise, a accueilli une centaine d'officiers supérieurs en devenir, issus des 8ème et 10ème promotions. À cette audience attentive, le ministre Muyaya a délivré un message clair et percutant, érigeant la communication au rang d'enjeu fondamental de sécurité nationale, et insistant sur l'impératif de rigueur et de respect des protocoles à chaque étape d'une situation critique.
Fort de son expérience personnelle, marquée notamment par la gestion simultanée de l'instauration de l'état de siège et de l'éruption du Nyiragongo dès sa prise de fonction, le ministre a illustré avec éloquence la nécessité d'une communication ciblée et adaptative pour naviguer avec efficacité les périodes de turbulence et œuvrer au retour à la normale.
Parallèlement à ces enseignements tirés du terrain, l'impact disruptif des réseaux sociaux sur la diffusion et la perception de l'information a constitué un axe central des discussions. Mettant en garde contre la vulnérabilité croissante des médias traditionnels face à un public hyper-connecté et parfois enclin à la désinformation, le ministre a plaidé avec force pour un renforcement continu du professionnalisme et de la crédibilité de l'ensemble des organes de presse, pierre angulaire de la lutte contre les "fake news". Selon sa conviction, "Si vous ne donnez pas la bonne information, vous créez la place pour la mauvaise," encourageant ainsi les futurs stratèges à accorder leur confiance aux médias publics tels que la RTNC et l'ACP, ainsi qu'à certains acteurs privés reconnus pour leur rigueur journalistique.
Ensuite, l'intervention ministérielle a opéré une plongée analytique au cœur du conflit complexe qui déchire l'est du pays. Avec une lucidité tranchante, le ministre Muyaya a exposé les enjeux sous-jacents à cette crise, allant des ambitions d'expansion territoriale et des dynamiques démographiques au contrôle stratégique des ressources naturelles et à l'extension des sphères d'influence. Dans cette analyse, il a qualifié la menace rwandaise de "guerre économique pour sa survie," établissant une distinction avec les motivations ougandaises, qu'il perçoit comme davantage orientées vers des bénéfices économiques mutuels. De même, les justifications avancées par Kigali – la présence des FDLR, la protection de la communauté Tutsi et le non-respect des accords passés – ont été soumises à un examen critique.
- Face à cette intrication de facteurs, le ministre a levé le voile sur la nature "hybride" de la guerre menée contre la RDC, dénonçant avec véhémence la stratégie rwandaise consistant à "distiller quotidiennement le poison" à travers des discours haineux et l'abandon cynique des réfugiés congolais. Selon son diagnostic, "Le poison rwandais est un mensonge bien orchestré et propagé par l'armée numérique rwandaise dans le but de nous affaiblir," se félicitant néanmoins d'une prise de conscience collective face à cette menace informationnelle insidieuse.
Afin de contrer cette offensive multidimensionnelle, qui se déploie sur les fronts militaire, diplomatique, médiatique, judiciaire et économique, le gouvernement déploie une mobilisation active. Dans ce cadre, le ministre a rappelé aux futurs cadres militaires que les relations internationales sont souvent régies par les intérêts plutôt que par l'empathie, les encourageant vivement à apporter leur contribution intellectuelle aux efforts gouvernementaux et aux Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC).
Lors d'une session interactive et enrichissante de questions-réponses, le ministre Muyaya a perçu des signes de fragilité chez l'adversaire rwandais, pointant du doigt des communications publiques jugées incontrôlées et discourtoises de son plus haut dirigeant. En réponse à la désinformation orchestrée, il a également annoncé la mise en place imminente d'une cellule de crise réactive à la désinformation émanant de l'armée numérique rwandaise et de ses alliés, faisant suite au discours présidentiel du 29 janvier 2025. Dès lors, la maîtrise du terrain médiatique est érigée en arme essentielle pour déconstruire les narratifs fallacieux, tant en période de crise aiguë qu'en temps de stabilité relative.
En guise de conclusion et de feuille de route pour l'avenir, le ministre a édicté les principes fondamentaux d'une communication de crise réussie : une prise de conscience aiguë de la situation, une collecte rigoureuse et rapide d'informations fiables, une évaluation précise de l'impact potentiel, un choix stratégique des canaux de diffusion, une dissémination maximale des messages clés et, surtout, la capacité cruciale de tirer les leçons de chaque événement. Avec une insistance particulière, il a averti que "La pire des stratégies à éviter à tout prix pour échapper à d'autres catastrophes dans la crise est celle du déni," léguant ainsi aux futurs stratèges militaires une boussole précieuse pour naviguer dans le tumulte informationnel de la guerre moderne.
Gracieux Bazege