RDC : Julien Paluku interpelle l’Union Européenne sur l’éventuelle exclusion du café et du cacao du marché européen
Lors d’un briefing presse, Julien Paluku Kahongya, ministre du Commerce Extérieur de la République démocratique du Congo (RDC), a exprimé ses préoccupations quant aux implications du règlement 2023/1115 de l’Union Européenne (UE). Ce règlement, visant à lutter contre la déforestation mondiale, pourrait potentiellement exclure le café et le cacao congolais du marché européen, compromettant ainsi l’économie agricole du pays.
Adopté par le Parlement européen le 31 mai 2023, le règlement 2023/1115 a pour objectif d’assurer que les produits de base importés dans l’UE ne contribuent pas à la déforestation. Parmi les produits ciblés figurent le café, le cacao, le soja, le palmier à huile et le caoutchouc. Pour accéder au marché européen, ces produits devront obtenir une certification garantissant leur conformité avec les normes environnementales strictes de l’UE, y compris le label «BIO».
Initialement prévue pour entrer en vigueur le 1er janvier 2025, cette réglementation a été reportée au 31 décembre 2025, afin de permettre aux pays partenaires, dont la RDC, de mettre en place des mécanismes de contrôle rigoureux.
Julien Paluku a souligné l'importance de distinguer les terres agricoles congolaises des forêts tropicales. «Nos 80 millions d’hectares de terres arables, dont beaucoup sont situées dans des savanes, n’impactent pas directement notre couvert forestier», a-t-il affirmé. Selon lui, la RDC enregistre un faible taux de déforestation annuelle de 0,03 %, loin derrière les grandes puissances industrielles responsables de la majorité des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Le ministre a également rappelé le rôle crucial des forêts du bassin du Congo dans la stabilisation climatique mondiale. Il a défendu l’agroforesterie pratiquée en RDC, où le café et le cacao sont cultivés de manière naturelle et durable.
Julien Paluku a mis en garde contre une éventuelle sanction de l’UE, qui pourrait favoriser des pays voisins accusés de piller les ressources agricoles congolaises à travers des conflits armés. «Sanctionner le café et le cacao congolais reviendrait à tomber dans le piège des pays qui alimentent l’insécurité chez nous pour exporter frauduleusement nos produits», a-t-il déclaré.
Pour répondre aux exigences du règlement européen, le ministre a annoncé plusieurs initiatives, parmi lesquelles : le renforcement des organismes nationaux de certification, tels que l’ANAPEX et l’ONAPAC, pour réduire la dépendance aux auditeurs extérieurs ; la mise en place de zones économiques spéciales, notamment à Musienene (Nord-Kivu), pour encourager la transformation locale du café et du cacao ; la promotion du guichet unique pour la certification des produits agricoles destinés à l’exportation ; et la diversification des marchés internationaux, notamment via l’AGOA pour accéder au marché américain et l’Asie pour capter une clientèle croissante.
Le ministre a conclu en appelant à une collaboration renforcée avec l’Union Européenne pour établir des mécanismes de contrôle adaptés. Il a également invité les enquêteurs européens à visiter les zones de production de la RDC, y compris les régions touchées par l’insécurité.
«Nous souhaitons une coopération gagnant-gagnant avec l’UE, pour soutenir notre agriculture et garantir des exportations de qualité, équitables et écologiques», a-t-il affirmé. Ce discours marque la détermination de la RDC à défendre ses intérêts tout en s’alignant sur les exigences environnementales internationales.
Gracieux Bazege